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Philippe Bataillon (Traducteur)
EAN : 9782020838269
476 pages
Seuil (07/10/2005)
4.1/5   58 notes
Résumé :
Antonio Muñoz Molina a l'intime conviction que chacun de nous enferme en soi, comme un coffre à l'ouverture capricieuse, un ou plusieurs romans.
Que la vie suit des méandres compliqués aux allures d'échecs, de catastrophes, de défaites grandioses et tristes comme des sanglots de géants.
Son dernier livre se penche sur ces hommes et ces femmes dont la clarté de l'existence fut soudain masquée par les horreurs de la Seconde Guerre mondiale.

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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Ouvrir « Séfarade », c'est entrer dans un royaume où les frontières du temps sont abolies, c'est entendre la voix de ces ombres qui peuplent notre passé, c'est écouter le témoignage des oubliés, des bannis, des exilés qu'ils soient anonymes ou familiers comme Primo Levi, Milena Jesenska, Franz Kafka, Margarete Beuber-Neumann ou Willi Munzenberg, Jean Amery.

« Une sorte d'encyclopédie de l'exil » pour reprendre les mots de l'auteur dans le sens qu'il accorde à ce titre « Séfarade ».

C'est un recueil de dix sept chapitres qui n'est aucunement un recueil de nouvelles. le terme « Séfarade » s'entend, dans ce livre, non comme l'histoire des juifs originaires de la péninsule ibérique, chassés par Isabelle la Catholique mais plutôt comme le terme qui renvoie aux thèmes de l'exil partant du principe qu'il n'est pas nécessaire d'être juif pour faire partie de la grande famille des exclus. Il dit bien « chacun peut devenir le juif d'un autre ».

Seul, le dernier chapitre s'intitule « Séfarade », un chapitre émouvant sur le portrait d'une fillette de Vélazquez admiré par l'auteur à New York dans un musée, loin des lumières de la ville, le Hispanic Society of America.

Sur le thème du bannissement, du déracinement, parfois du voyage aussi, dix sept chapitres qui entrent en résonnance avec la Grande et la petite histoire où se mêle la fiction.

Machine à remonter le temps, mémoire de tous les exilés, à ceux qui ont fuit, à ceux qui sont restés, à tous les coupables sous aucun motif. Muñoz Molina les ressuscite à travers des témoignages, des rencontres comme des écrits, l'auteur donne la parole à toutes ces voix qui résonnent dans le silence de l'Histoire, tous ces destins brisés par les régimes totalitaires et le XXème siècle a été fécond.
Il dénonce les crimes du stalinisme, du nazisme et cette guerre espagnole qui reste un traumatisme empoisonnant l'inconscient collectif de tout un peuple.

A travers tous ces messages, ces confidences venus de la nuit des temps, Muñoz Molina évoque le destin de ces femmes de républicains espagnols pendant et après la guerre civile comme le sort de tous ceux qui ont connu l'exil forcé comme l'exil intérieur, tout aussi destructeur. le Passé ressurgit. Comment peut-on oublier, nous qui sommes les héritiers de ce passé, vivre comme si rien ne s'était passé.

Une réflexion amène une nouvelle réflexion, incessant aller-retour entre passé et présent. Des personnes sortent ainsi de l'oubli, d'autres inconnus se racontent. C'est ainsi que j'ai appris, par la voix de la fille d'un républicain ce que sa mère, épouse d'un rouge, avait subi à la fin de la guerre civile. Elle avait été tondue : cette pratique de la tonte des femmes était usuelle chez les fascistes et fut, hélas, reprise en France par les Compagnons de la Libération.

L'auteur articule les réalités d'hier et celles d'aujourd'hui, jeu de miroir entre passé et présent, connexion entre diverses situations à travers le temps, tout est relié, comme lorsque vous cuisinez une tarte et qu'à travers ce geste, c'est votre grand-mère qui cuisine ou lorsque vous vous baignez sur les plages du Débarquement, situation façon Palimpseste. Sa narratrice ou son narrateur est identifiable parfois par le « je » et d'autre fois par « il ou elle » mais la lecture est aisée et tous ces récits ont pour vocation d'engendrer l'empathie du lecteur pour ne pas oublier !


Il m'est impossible de rester insensible à la mélodie que dégage l'écriture d'Antonio Muñoz Molina. IL possède un style d'écriture hypnotique qui n'appartient qu'à lui avec ses longues phrases simplement séparées de temps en temps par une virgule, dans une lente énumération, comme pour apporter des précisions supplémentaires ou mieux, pour nous faire épouser son propos. Il s'en dégage une grande humanité et une telle profondeur de réflexion qu'à chaque ligne, l'émotion, la révolte et la grandeur d'âme de cet auteur émergent.

Antonio Muñoz Molina est, à mes yeux, un très grand auteur dont j'admire l'écriture et ce livre est magnifique ! Trouver les mots pour rédiger cette chronique sans trahir le livre fut difficile tant la profondeur de réflexion de Molina est puissante et troublante.






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Pourquoi nos plus belles lectures et les profonds bouleversements qu'elles mettent dans nos coeurs sont elles les plus difficiles à partager?

 Pourquoi Sefarad qui m'a fait si grande impression, que j'ai lu avec un mélange de chagrin et de fascination- et si lentement, au début- ne se laisse t il ni raconter , ni expliquer,   ni critiquer?

Depuis 5 ans que je chronique presque toutes mes lectures sur Babelio c'est ,je crois , la première fois qu'un livre follement aimé pourtant me paraît hors de toute prise.

Essayons pourtant.

 Sefarad n'est pas un recueil de nouvelles, les 17 chapitres qui le constituent je les ai plutôt vécus comme 17 promenades en terre d'exil, 17 voyages sur les traces douloureuses,  cruelles , dérangeantes,  toujours sensibles et fraternelles,  de ceux qui sont partout d'éternels étrangers.

Certains de ces exilés sont connus:  Kafka, Milena, Margarete Buber Neumann, Evguenia Guinzburg, Michel del Castillo, Jorge Semprun, Pablo Casals..
D'autres le sont  moins comme Willi Münzenberg, Babette Gross, Jean Amery .
D'autres enfin oscillent entre fiction et réalité :  Camille Safra, Isaac Salama, ou ce  cordonnier possédé d' une nonne rebelle,  cette  fille de "rouge" qui se croit sans père,  ce médecin inquiet , cet  homme hanté par un ancien amour,  ce voyageur entre deux trains, entre deux temps, entre deux souvenirs.

Tous en exil. 

En exil de leur pays, quel qu'il soit. Chassés de cette emblématique Sefarad, nom  hébreu  de l'Espagne pour les juifs orientaux qu'Isabelle la catholique chassa en 1492 de cet eden de paix de science  et de culture qu'ils partageaient  avec les Arabes,  eux aussi chassés de la terre andalouse, précipitant  derechef l'Espagne brillante , ouverte et lumineuse dans les feux de l'inquisition et les ténèbres du fanatisme.

En exil de leur passé,  de leurs rêves,  de leurs utopies aussi. Utopie du communisme qui se révèle aussi ravageur que le fascisme qu'il prétendait affronter. Les camps ceints de barbelés  hérissent l'Europe, d'Argelès à  Ravensbruck, et d'Auschwitz à  Kolyma. Et les trains la sillonnent : sur les rails sont ballottées les  existences fragiles et  tragiques de tous ces "étrangers" qui découvrent leur étrangeté dans le regard des autres. Dans l'étoile jaune qu'on épingle à leur poitrine, dans la maladie qui fait d'eux des parias, dans la folie maniaque des ogres au pouvoir qui  excluent, traquent, tuent aussi bien ceux qui croyaient les servir aveuglément que ceux qui pensaient leur échapper en  vivant discrètement  leur vie anonyme.

En exil d'humanité,  d'identité,  de fraternité,  d'amour.

Mais ce qui rend ces exilés si proches, si intimement en résonance avec nos vies, ce sont les liens tendres, subtils, profonds, déchirants que tisse entre eux et nous, entre passé et présent , entre orient et occident, entre brûlante Espagne et Sibérie glaciale,  la phrase magique, enveloppante,  méandreuse, ensorcelante  d'Antonio Muñoz Molina.

Plus longue, plus envoûtante, plus entortillante encore que la proustienne, la phrase "molinesque" m'a prise dans ses filets, arrimée, encoconnée.

 Emballée.

Un peu perdue au début,  j'ai très vite cessé de lutter, comme la mouche prise dans la toile d'araignée . Insensiblement, le poison doux de la mélancolie s'insinuait un peu plus , à chaque chapitre, dans mon esprit et mon coeur, en y creusant une vertigineuse tristesse.

"La tristesse, disait Gide, est comme un poison. On peut l'aimer, mais non s'en trouver bien".

 C'est faux.

Sefarad m'a fait toucher le fond d'une immense tristesse, que j'ai aimé éprouver , c'est vrai, puisque j'y revenais avidement, mais il a aussi mis des mots sur les maux de notre siècle , tissé des liens entre  ces exilés,  ces temps disjoints, ces diasporas éparses, ces destins écartelés.  Et il a ainsi, bizarrement, recréé une fraternité,  lucide et tendre, qui culmine, pour moi, dans le chapitre "Tu es" qui m'a émue aux larmes.

"Tu es chacune des diverses personnes que tu as été, et aussi celles que tu t'imaginais pouvoir être, et chacune de celles que tu n'as jamais été, et celles que tu désirais ardemment être et que, maintenant, tu te félicites de n'être pas devenu."

Sefarad est un livre unique et puissant: il fait autant de peine que de bien, il bouleverse et fait penser, il déroute et il aiguille, il sépare et il enveloppe. Inoubliable.Il n'y a pas assez d'étoiles pour l'honorer.

Merci Martine pour me l'avoir fait découvrir. 
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"J'ai été comme ces mauvaises herbes arrachées,
Déposées en gerbes alignées sans discernement.
Depuis, j'ai été moi, oui moi, à ma perte,
Et moi, à ma perte, je ne suis ni moi ni un autre ni personne.»
(Fernando Pessoa)

«Sefarad», mot en hébreu médiéval désignant à la fois l'Espagne et le Portugal, ainsi que les juifs originaires de la péninsule ibérique, expulsés en 1492 par les rois catholiques Ferdinand et Isabel, se transforme, sous la plume de Antonio Muñoz Molina, en paradigme et métaphore par excellence au sentiment d'exil, qu'il soit extérieur ou intérieur, réel ou imaginaire, forcé ou volontaire ; synonyme non seulement de diaspora, de bannissement, mais aussi de migration, de déportation, ou encore de désir d'évasion, délivrance ou délestage du poids de son histoire personnelle, de son passé, de toutes les contraintes qu'on se serait petit à petit vu infliger à être untel, plutôt qu'un autre…
Projet littéraire sans pareil, surdimensionné et grandiose («encyclopédique» selon les mots de l'auteur lui-même), dans SÉFARADE, l'ambition de la plume de Molina pourrait nous renvoyer à la célèbre gravure de Dürer, «La Melencolia», à l'image de cet ange abandonné au milieu des outils et des artefacts dont la vanité humaine se pare afin de nourrir l'illusion d'appréhender le monde, un livre ouvert sur les genoux, une sphère représentant la quête d'absolu à ses pieds, le regard cependant tourné vers l'intérieur, songeur, comme dans l'attente de pouvoir transcender la distance infranchissable qui sépare les hommes les uns des autres, la fiction de la réalité, l'inaltérable de l'impermanent. Au bout du compte, à quoi cela servirait de vouloir se mettre à place d'un autre, se demande l'auteur? Quelle vanité à aspirer à cerner l'essence profonde d'un être, quand tout un chacun, à commencer par soi-même, n'est au fond «n'importe qui et personne »: «tu es celui qui tu inventes ou dont tu te souviens, celui qu'inventent ou dont se souviennent les autres». Et puis, quelle frivolité à vouloir créer des personnages de fiction, «alors qu'il y a tant de vies qui mériteraient d'être racontées, chacune d'elles comme un roman, un réseau de ramifications qui mènent à d'autres romans, à d'autres vies»?
C'est n'est que par un long exercice d'introspection et d'écriture (SEFARADE aura nécessité de longues années de préparation à son auteur, avant sa rédaction définitive), à l'abri du piège tendu par les tribulations de l'immédiat et par la vanité de la reconnaissance de ses pairs, suivant à lettre, tant que peut se faire, le précepte énoncé par Pascal («Tous les malheurs s'abattent sur l'homme parce qu'il ne sait pas rester seul dans sa chambre»), ce n'est qu'ainsi, par un regard porté à l'intérieur de soi et sur son propre «roman» que ces frontières pourraient être momentanément abolies, qu'on pourrait faire table rase des remparts isolant notre mémoire et l'imagination, nos souvenirs de nos affabulations, notre moi supposé réel de nos propres fictions. Les dix-sept récits qui composent SEFARADE, à la fois indépendants, ramifiés et subtilement enchevêtrés les uns dans les autres, en sont une preuve incontestable.
Antonio Muñoz Molina nos ouvre sans réserves la porte de la «chambre à soi» de l'écrivain, nous invite à découvrir sa bibliothèque et ses archives personnelles, à feuilleter les livres qu'il avait patiemment annotés pendant des années et racontant la destinée tragique de quelques-uns des plus célèbres exilés du XXème siècle (dont Primo Levi, Milena Jesenska, Willi Münzenberg, Evguénia Guinzbourg, Cesare Pavese..). L'auteur nous invite tout aussi naturellement à pénétrer dans l'intimité de son processus de création, au coeur des tentatives de transposition en matière littéraire de son propre «chagrin quotidien des mathématiques d'être» (F. Pessoa), il nous autorise même, par moment, à approcher du berceau dans lequel sont délicatement déposés ses personnages de fiction à peine émergés de son esprit démultiplié. C'est ainsi, dans une sorte d'étrange synergie créée par un mécanisme littéraire aux volants atemporels et circulaires que l'auteur lui-même, ses personnages, réels ou fictifs, et nous autres, ses lecteurs, partagerons, le temps d'un récit complètement inclassable (ni roman, ni autobiographie, ni fiction, ni essai sur l'exil…et tout cela à la fois!), un sentiment profond de communion. Réunis un instant en une sorte de Pangée originelle, continent imaginaire dont tous les hommes émargeraient, unis et indifférenciés, d'où personne ne serait plus banni ou oublié. Transportés aussi, par la pensée, dans ces compartiments de train où d'innombrables exilés, certains anonymes et oubliés par L Histoire, d'autres entrés dans la postérité, s'étaient un jour trouvés embarqués, parcourant en leur compagnie les réseaux ferrés d'un continent européen exsangue. Suivant l'histoire de personnages réels ou de fiction, croisés par l'auteur, sur d'autres réseaux, réels ou imaginaires, dans d'autres lieux, à différents moments de leur vie, en d'autres compartiments, trains, avions, villes étrangères, hôtels, maisons d'enfance, certains d'entre eux ayant cherché volontairement à s'exiler ou songeant malgré tout à la possibilité d'un retour devenu impossible, toujours différé. Témoins de rencontres entre l'auteur et ses personnages fictifs auxquels il s'applique à vouloir donner corps, comme par exemple dans le chapitre intitulé « Berghof », lorsque les doigts de Antonio Muñoz Molina tapant sur le clavier de son ordinateur, dans la pièce plongée dans la pénombre où il travaille durant une résidence littéraire à Rome, s'emmêlent à ceux d'un personnage en train de naître, un médecin dans son cabinet de consultation, assis comme lui derrière son bureau ; les plans fictionnels et biographiques glissent imperceptiblement, se superposent, puis se détachent progressivement, amenant le lecteur à comprendre enfin que le personnage avec lequel l'auteur formait bloc au départ, est un médecin en train de se demander comment annoncer à un patient fictif ce qu'un autre médecin, réel celui-ci, avait été obligé de communiquer quelques années auparavant à l'auteur lui-même : le diagnostic brutal de la maladie qui les exilerait tous les deux subitement du monde rassurant des bien-portants.
Comment décrire la tonalité mélancolique de cette voix sublime à travers laquelle l'irréversibilité du temps et la mémoire de la souffrance liées à toutes les formes possibles d'exil sont ici magistralement conjuguées ? Sa beauté serpentine de chant judéo-espagnol. Sa sonorité familière et universelle, paradoxale aussi quand elle est à la fois hantée par l'appel intime du départ, et bercée par l'illusion bienfaisante d'un retour définitif dans un mythique chez-soi. Traduite en phrases touffues, au parfum parfois entêtant, sans être pourtant jamais alambiquées, façonnées en quelque sorte à l'aide d'un zoom spatial et temporel opérant des aller-retours perpétuels entre le temps à vivre et le temps déjà vécu, entre l'infiniment particulier et petit, et l'infiniment grand et universel, étirant par la même occasion la longueur de leurs tournures et les cercles du possible qu'elles s'appliquent à vouloir élargir.
Magnifique voix, faisant de SÉFARADE une oeuvre sensible, d'une intelligence émotionnelle remarquable, un livre émouvant et inoubliable.


PS : Estimado señor Molina,
Je vous avais écrit une première fois, ici, il y a un an environ. Un message suite à la lecture de - «Un promeneur solitaire dans la foule», votre dernier ouvrage en date à l'époque et, d'autre part, ma toute première approche de votre oeuvre – une critique sous forme de lettre où, sur un ton très agacé, je vous expliquais les raisons de mon abandon du livre au bout d'une centaine de pages. Je ne vous connaissais pas assez, señor Molina et, peut-être, avais-je aussi ouvert la mauvaise porte pour commencer à faire connaissance avec votre univers ? Dans tous les cas, notre premier rendez-vous fut complètement raté, mon jugement probablement trop sévère, trop hâtif.
Je regrette aujourd'hui la tonalité générale de cette critique acerbe, et je tiens à vous le dire sous la forme de ce post-scriptum. J'avais été rebuté à ce moment-là par ce que j'avais qualifié d'un «amas d'impressions que vous acceptez sans discrimination de transcrire, souvent sans queue ni tête, des bouts de descriptions de tout et de n'importe quoi, un immense collage d'informations de toutes sortes qui ne cesse de se disloquer sans direction précise». Vous aviez déclaré à l'époque, à propos de votre entreprise littéraire, être motivé par la tentation de «tout écrire». Et moi je vous avais ironiquement apostrophé: «Tout écrire», voyons, señor, quelle ambition, quel rêve insensé pour un écrivain! Qui veut tout, dit la sagesse populaire, risque de ne rien obtenir..!».
Estimado señor Muñoz Molina, il faudra peut-être que je relise un jour votre «Promeneur solitaire dans la foule», car, à mon grand étonnement, ce que je vous reprochais alors, votre envie de tout embrasser, l'incroyable ambition sous-jacente à votre plume, votre style résolument centrifuge, son point de fuite comme en perpétuelle évanescence, vous obligeant à rajouter sans cesse des considérations supplémentaires, des détails, des nuances, des adverbes , des adjectifs, voici donc qu'exactement les mêmes défauts reprochés si emphatiquement hier, finiraient par me subjuguer complètement à la lecture de SÉFARADE aujourd'hui !!
Que s'est-il passé entretemps ? Je ne sais pas vraiment, mais je dois vous avouer qu'en refermant votre livre cette fois-ci, je me suis entendu dire moi-même que l'une des raisons probables de mon agacement initial résiderait peut-être dans...nos ressemblances! Je crois que nous serions bien quelque part, frères dans l'âme, señor Muñoz Molina !! Nous devons carburer au fond tous les deux à la même énergie saturnienne, les quêtes d'absolu et les conquêtes perdues d'avance sont susceptibles de nous fasciner, la solitude et le renoncement nous exalter, tout autant que la saudade ou les Préludes de Chopin…
Pourquoi vous raconterais-je tout ceci? Parce qu'ici, je serais en quelque sorte pour vous, moi aussi, «n'importe qui et personne»? Réel et fictif Creisifiction… !!
Allez, une dernière citation, à ce propos et pour la route… :
«Celui qui voyage peut garder un silence qui sera mystérieux pour les inconnus qui le remarquent, ou céder sans danger à la tentation de parler et de devenir un menteur, d'enjoliver un épisode de sa vie en le racontant à quelqu'un qu'il ne verra plus jamais. Je crois qu'il n'est pas vrai, comme on le dit, qu'en voyageant on pourrait devenir un autre : ce qui se passe, c'est qu'on se trouve allégé de soi-même, de ses obligations et de son passé, tout comme on réduit tout ce qu'on possède aux quelques choses nécessaires à son bagage. »
Bien à vous!
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Si on me demandait comment "classer" ce livre, je n'aurais aucune réponse, j'ai beaucoup de mal à le résumer, et même à en parler!
Ce n'est pas un roman, mais il contient de la fiction.
Ce ne sont pas des nouvelles, je ne le pense pas, bien qu'il soit constitué de dix-sept chapitres retraçant chacun une histoire différente, mais les personnages de ces histoires peuvent, ou non, se retrouver dans une autre....
Ce n'est pas un récit bien qu'il retrace des destins historiques.
Ce serait peut être plus simple de faire un dessin ? Et, sur une feuille blanche, au centre, je mettrais un gros point, très noir. Ce point, c'est Joseph K. qui, à aucun moment, n'a été accusé de quoi que ce soit, si ce n'est d'être coupable. Passage du statut d'innocent à celui de coupable, sans bien sûr savoir de quoi on peut bien être coupable.
Relié au point noir Joseph K., je dessinerais un point gris, l'auteur, en lisant ceci :


"Je suis très doué pour éprouver cette espèce d'angoisse, pour manquer le sommeil en m'imaginant que toi et moi sommes dans ce train. Je suis terrifié par les papiers, les passeports et les certificats qu'on peut perdre, les portes que je n'arrive pas à ouvrir, les frontières, l'expression indéchiffrable ou menaçante d'un policier, de quelqu'un qui porte un uniforme et brandit face à moi une quelconque autorité. J'ai peur de la fragilité des choses, de l'ordre et de la tranquillité de notre vie toujours précaire et suspendue à un fil qui peut casser, de la réalité quotidienne si assurée et familière qui peut se briser dans la catastrophe d'un malheur."

Du point gris de l'auteur partiraient des lignes, plus ou moins sécantes, quelquefois parallèles, s'entrelaçant, se croisant , bref une espèce de toile d'araignée, mais toutes ces lignes bien sûr finiraient par rejoindre le point noir central. Ces lignes correspondraient à cette simple phrase :"Il n'y a pas de limite aux histoires inimaginables qu'on peut entendre à condition de faire un peu attention, aux romans qu'on découvre soudain dans la vie de n'importe qui."

Elles représenteraient soit des destins connus de tous comme ceux de Primo Levi, Milena Jesenska, Evguénia Guinzgourg, Margarete Buber-Neumann, personnages que l'on retrouve dans la plupart des chapitres, mais aussi les récits d'autres vies, fiction ou non. le seul point commun chez ces personnages étant bien sûr le fait de se retrouver un jour coupables et de ne pas comprendre pourquoi.

C'est sûr que comme dessin, ce ne serait pas génial, mais il correspond à ma vision de ce livre !
Dans les critiques que j'ai lues à son sujet, on évoque en permanence le thème de l'exil.
Ce thème est certes très présent ; les coupables fuient par tous les moyens possibles (un des plus beaux chapitre est, pour moi, "Dis moi ton nom" qui évoque l'exil de musiciens d'Amérique latine d'abord vers l'Argentine puis vers l'Espagne).
Et le titre du livre "Séfarade" est un hommage rendu à la mémoire des juifs expulsés en 1492.
Mais la douleur de l'exil n'est pas le thème dominant. le thème dominant , pour moi, est l'éternelle question : pourquoi ai-je été déclaré coupable, pourquoi tout à coup suis-je obligé de perdre mon identité pour adopter celle qu'on m'attribue ?

Dans le chapitre "Tu es" :
"Tu crois savoir qui tu es et en fait tu es soudain transformé en ce que les autres voient en toi, et , peu à peu, tu deviens plus étranger à toi même, et même ton ombre est ton espion qui te suit pas à pas, et de tes yeux tu vois le regard de ceux qui t'accusent, qui changent de trottoir pour ne pas te dire bonjour..."

Bon, je crois que finalement, il vaut mieux que je ne fasse pas de dessin...
Très beau livre!

En " citation", la postface, les livres utilisés par l'auteur. .





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Eh bien, voilà mon premier coup de coeur de l'année.
Séfarade est un recueil de nouvelles liées entre elles par un lien ténu, subtil. Il n'y est pas tellement question de l'expulsion des juifs d'Espagne en 1492. Beaucoup plus de leur persécution pendant la seconde guerre mondiale. Mais plus encore d'autres qui ont partagé ou qui ont été témoins d'expériences similaires.
J'ai d'abord été frappé par la proximité avec la galaxie des auteurs et des personnages qui me touchent: le Kafka des Lettres à Milena, Milena Jesenska elle-même, Margarete Buber-Neumann, Giorgio Bassani, Primo Levi, Willi Münzenberg, que l'on retrouve dans Ostende 1936 de Volker Weidermann, la guerre d'Espagne et les totalitarismes en tous genres. Ou plus simplement les trajectoires individuelles, les deuils et la culpabilité, l'exil, les désirs qu'on n'assouvira jamais, la dépossession qu'impose le monde moderne, les mauvaises nouvelles annoncées par le médecin, la déchéance des junkies, la quête de soi, impossible à mener à bien.
Tout cela est pris à hauteur d'humain, avec une attention subtile, une bienveillance parfois désolée, ou admirative, une conscience de la perte.
Évidemment c'est un peu mélancolique, voire tragique par moments, mais c'est conté avec une telle proximité que l'on ne peut que suivre et partager toutes ces destinées.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Aussi nettement que je me rappelle mon premier voyage en train, je me rappelle la première fois que je suis arrivé sur les quais d'une gare frontalière : dans mon souvenir, l'éclat de la nuit est le même et aussi les attentes de l'imagination, la peur de l'inconnu qui accélérait mon pouls et m'affaiblissait les genoux. Des gardes civils avec une sale tête puis des gendarmes hostiles et grossiers examinaient les passeports dans la gare de Cerbère.
Cerbère ; parfois les gares ressemblent dans la nuit au royaume d'Hadès et leur nom comporte déjà un début de maléfice ; Cerbère, où les gendarmes français, pendant l'hiver de mille neuf cent trente-neuf, humiliaient les soldats de la République espagnole, les injuriaient et les bousculaient à coups de crosse ; Port-Bou, où Walter Benjamin s'est suicidé en mille neuf cent quarante ; Gmünd, la gare frontière entre la Tchécoslovaquie et l'Autriche, où, de temps en temps, se sont rencontrés Franz Kafka et Milena Jesenska, rendez-vous clandestins dans la parenthèse de temps entre des horaires de trains, dans la brièveté exaspérée des heures qui déjà commençaient de s'épuiser dès qu'ils s'apercevaient, dès qu'ils montaient vers la chambre inhospitalière de l'hôtel de la gare, où le proche passage des trains faisait vibrer les vitres de la fenêtre.
Quel choc ce devait être que d'arriver dans une gare allemande ou polonaise dans des wagons à bestiaux, d'entendre dans les haut-parleurs les ordres criés en allemand et de ne rien comprendre, de voir au loin des lumières, des barbelés et de très hautes cheminées qui crachaient de la fumée noire! Cinq jours durant, en février mille neuf cent quarante-quatre, Primo Lévi a voyagé en train vers Auschwitz. Par les fentes entre les planches dont il approchait sa bouche pour pouvoir respirer, il a vu les noms des dernières gares d'Italie et chaque nom était un adieu, une étape dans ce voyage vers le nord et le froid de l'hiver, noms indéchiffrables de gares en allemand puis en polonais, nom de villes reculées que personne n'avait alors entendus, Mauthausen, Bergen-Belsen, Auschwitz. Margarete Buber-Neumann a mis trois semaines depuis Moscou pour parvenir au camp de Sibérie où elle devait purger une peine de dix ans et quand après trois ans seulement, on lui a ordonné de monter à nouveau dans un train, pour Moscou, elle a pensé qu'on allait la libérer mais le train ne s'est pas arrêté à Moscou, il a continué son voyage vers l'ouest.

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Note sur mes lectures

J'ai très peu inventé dans les histoires et dans les voix qui se croisent dans ce livre. J'en ai entendu raconter certaines et elles habitaient ma mémoire depuis longtemps. J'ai découvert Willi Münzenberg en lisant
La fin de l'innocence de Stephen Koch ,et j'ai suivi sa piste dans Le passé d'une illusion de François Furet, livre aussi admirable que son titre, ainsi que dans le deuxième volume des mémoires d'Arthur Koestler, Hiéroglyphes et sur un nombre surprenant de pages internet.
J'ai découvert le beau nom de Milena Jesenska dans les surprenantes Lettres à Milena de Frantz Kafka, un livre de poche qui m'a longtemps suivi. C'est ce prénom, isolé comme titre d'un livre, Milena , qui m'a amené à découvrir son auteur, Margarete Buber-Neumann, dont j'avais trouvé la piste chez Koch et Furet en tant que personnage mineur, cité dans des notes en bas de page.
Les deux volumes de son autobiographie, Prisonnière de Staline et d'Hitler: Déportée en Sibérie et Déportée à Ravensbrück dont j'avais découvert la trace dans le catalogue du Seuil, m'ont été rapidement envoyés de Paris par mon éditrice, Annie Morvan. Il est étrange que sur ce sombre épisode des enfers construits par le nazisme et le communisme abondent tant de témoignages féminins.

Ont été capitaux pour moi Contre tout espoir de Nadejda Mandelstam, et surtout Le Vertige d'Evguénia S. Guinzbourg, dont j'avais lu pour la première fois le nom dans un livre extraordinaire de Tzvetan Todorov, Face à l'extrême que j'ai découvert dans sa traduction anglaise, Facing the Extreme, Moral life in the Concentration Camps. . J'ai beaucoup appris sur Todorov en lisant "L'homme dépaysé ".

A propos de la situation des Juifs d'Espagne, j'ai lu à fond "Les origines de l'Inquisition ", la tendancieuse et monumentale étude de Benzion Netanyahu, et, beaucoup plus brève et équilibrée, la classique Histoire de L'inquisition espagnole d'Henry Kamen, sans oublier un livre qui personnellement me semble extraordinaire, malgré son extrême concision, Historia de una tragedia de Joseph Perez.
Mon ami Emilio Lledo a lu pour moi le très long journal du professeur Klemperer dans l'original allemand ( Victor Klemperer, Mes soldats de papier, Journal 1933-1941, et Je veux témoigner jusqu'au bout, Journal, 1942-1945.....)

Mais j'oubliais presque de citer deux des auteurs les plus décisifs pour ma formation dans les années récentes, sans lesquels il est probable que ce livre n'aurait pas existé, que je n'aurais pas trouvé l'état d'esprit nécessaire à l'écrire.
Je fais référence à Jean Améry et à Primo Levi.
J'ai découvert par hasard en 1995 le livre de Jean Améry sur Auschwitz dans une librairie d'occasion, sans en avoir jamais entendu parler. Il a été publié par Actes Sud en 1995 sous le titre Par delà le crime et le châtiment , et je n'ai pas entendu dire qu'il ait intéressé aucune maison d'édition espagnole .
Grâce à Mario Muchnik, le lecteur espagnol a accès à la grande trilogie des mémoires de Primo Levi, qui comprend Si c'est un homme, La Trève, Les Naufragés et les Rescapés: quarante ans après Auschwitz.

Ce que l'on peut apprendre sur l'être humain et sur l'Histoire de l'Europe au vingtième siècle dans ces trois volumes est terrible mais aussi très instructif et honnêtement, je ne crois pas que ,sans les avoir lus, il soit possible d'avoir une conscience politique accomplie, ni une idée de la littérature qui ne comprendrait pas l'exemple de cette manière d'écrire.

Il y a eu d'autres livres, mais ceux que j'ai cités plus haut sont ceux qui m'ont le plus nourri pendant que j'écrivais Séfarade.
J'ai aussi tâché de prêter attention à beaucoup de voix, parmi elles je dois citer avec gratitude celles de Francisco Ayala et de Jose Luis Pinillos, la voix sonore et joviale d'Amaya Ibarrui ,qui par un matin d'hiver m'a invité à prendre un café et m'a raconté certains épisodes extraordinaires du roman de sa vie, la voix d'Adriana Seligmann qui m'a parlé des cauchemars en allemand de son grand-père, et la voix de Tina Palomino qui est venue chez moi un soir alors que je croyais terminé ce livre et qui m'a fait comprendre sans s'en rendre compte, tandis que j'écoutais l'histoire dont elle me faisait le cadeau, qu'il reste toujours autre chose qui mérite d'être raconté.

Madrid, décembre 2000
Antonio Munoz Molina
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Une nuit de janvier mille neuf cent trente-huit, les coups résonnent enfin à sa porte. Mais ils ne sont pas venus pour l'emmener seulement pour confisquer les derniers biens du renégat Heinz Neumann. Les policiers en uniforme rassemblent les derniers livres que Greta n'a pas encore mal vendus pour acheter de quoi se nourrir, quelques vieilles chaussures de son mari et en partant, ils lui donnent un reçu. Quelqu'un lui raconte que l'ami qu'elle retrouvait dans le parc a été arrêté quand il essayait de prendre un train pour la Crimée.

Ils sont arrivés un matin très tôt, le dix-neuf juillet, et en s'apercevant que cette fois c'était vraiment pour elle qu'ils venaient, Greta (Beuber-Neumann) n'a pas été saisie de panique mais plutôt de soulagement. On l'a conduite à la Loubianka sur le siège arrière d'une petite camionnette noire, entre deux hommes en uniforme bleu clair qui ne la regardaient pas et ne lui adressaient pas la parole. Cette fois ses genoux ne tremblaient pas et à ses pieds se trouvait la valise qu'elle avait préparée depuis si longtemps. Elle s'est rappelé la dernière chose qu'elle avait vue dans les rues de Moscou avant que la camionnette ne franchisse la porte de la prison : une horloge lumineuse qui dans l'aube avait un éclat faible et rougeâtre.

Le douze juillet, le professeur Klemperer se souvient dans son journal de quelques amis qui ont quitté l'Allemagne, qui ont trouvé du travail aux Etats-Unis ou en Angleterre. Mais comment partir sans rien, lui, un vieux, et sa femme malade sans connaître de langues étrangères, sans aucun savoir-faire pratique, comment abandonner la maison qu'ils ont fini par construire avec tant de difficultés, le jardin qu'Eva a presque transformé en un verger. Nous sommes restés ici dans l'ignominie et la gêne, comme des laissés pour compte, des enterrés vivants, enterrés pour ainsi dire jusqu'au cou en attendant d'un jour à l'autre les dernières pelletées.

pages 75/76
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Mes yeux se ferment, le livre me glisse presque des mains pendant que Will Münzenberg marche, perdu dans la foule qui se répand sur les routes, qui se disperse dans les champs voisins comme un vol d'insectes chaque fois que s'approchent les avions de chasse allemands volant en rase-mottes, d'abord les moteurs au loin, puis des silhouettes métalliques brillant dans le soleil de juin, et enfin leurs ombres, grands oiseaux de proie aux ailes immobiles et ouvertes, mitraillant un convoi de véhicules militaires en fuite, larguant leurs bombes sur un point où s'entassent les fugitifs, ralentis dans leur avancée par un camion en panne. Des insectes en fuite, c'est ce que verront les pilotes depuis le ciel : silhouettes minuscules, griffonnages noirs obliques. Mais chacune de ces créatures infirmes est un être humain, il a son nom et sa vie, un visage qui n'est semblable à celui de personne d'autre. C'est parmi eux que Willi Münzenberg veut se cacher, il veut n'être personne pour échapper aux grandes mains et à la gueule du cyclope. Mais l'œil du cyclope qu'il connaît le mieux et qu'il craint le plus, Joseph Staline, voit tout, scrute tout, ne permet à personne de s'échapper ni de sauver sa vie, même en se réduisant à la taille de l'insecte le plus lamentable, un condamné ne peut pas échapper à sa poursuite.
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Tu changes de ville, de chambre, de visage, de ville, d'amour, mais même quand tu te dépouilles de tout, il reste toujours quelque chose de permanent, qui réside en toi depuis que tu es doué de mémoire et depuis bien avant que tu aies atteint l'âge de raison, le noyau ou la moelle de ce que tu es, de ce qui jamais ne s'est éteint, non pas une conviction ni un désir, mais un sentiment, parfois amorti comme la braise du feu de la veille cachée sous les cendres, mais presque toujours très vif, qui palpite dans tes actions et qui colore les choses d'un éloignement durable dans le temps; tu as le sentiment d'être déraciné, étranger, de ne jamais être tout à fait nulle part, de ne pas partager les certitudes d'appartenance qui pour d'autres semblent si naturelles ou faciles, ni l'assurance avec laquelle beaucoup d'entre eux s'accommodent ou possèdent, ou bien tiennent pour acquises la solidité du sol où ils marchent, la fermeté de leurs idées, la durée future de leur vie.
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